Wilnis Trail (c) Alain Demaret

Wildnis Trail : trois jours sur les sentiers de l’Eifel

Début 2019, j’ai entendu parler du Wildnis Trail, un sentier tracé au cœur du Parc Naturel de l’Eifel, l’ouest de l’Allemagne. Départ le 2 avril pour  trois jours sur les sentiers de l’Eiffel et 85 km en pleine nature.

En un coup d’œil

À moins de 80 km de chez, moi, la ville de Höfen est presque dans mon jardin. C’est le point de départ du Wildnis Trail, un parcours d’un peu moins de 90 kilomètres à pied dans l’ouest de l’Allemagne. C’est le concept même de la microaventure dont je parle ici. Pourtant, dès mon arrivée à la porte de l’Eifel, le dépaysement est total. Ici, on ne parle que l’allemand et le “plat deutsch”, le dialecte local. Le parc possède un long passé militaire puisqu’il a été créé dans les limites de l’ancien terrain d’entraînement de la Wehrmacht, l’armée de terre allemande. En témoignent quelques avertissements du style : “Au-delà de cette barrière, danger de mort. Présence de munitions non démilitarisée”. Prudence donc. Le “hors-piste” est risqué.

Höfen — Einruhr

Le départ à Höfen (c) Alain DemaretLe premier jour a été assez facile. J’ai déposé ma voiture dans le parking prévu pour les randonneurs puis je suis passé par le bureau d’information pour me procurer la carte du parcours. Après, je me suis un peu arraché les cheveux. Le départ ne se donne pas sous le portique orné d’une magnifique tête de chat stylisé qui marque symbolise le tracé. Non, non, pour faire simple, le trail démarre à la sortie du parking. Ensuite le marquage est très présent. Il y a peu de risque de se perdre.

Dès le début, on emprunte de nombreux petits chemins qui se promènent au milieu d’une nature qui se renouvelle sans cesse. On prend des chemins qui longent des prairies, montent dans les bois, empruntent les pistes coupe-feu et les chemins d’accès pour les bûcherons. Il y avait 25 km à effacer et jamais je ne me suis lassé de cette promenade qui monte et descend au rythme des collines creusées par le lit de la rivière omniprésente. Ici et là, des affûts de chasseurs montrent que la région est pleine de surprise.

Sur les traces du chat sauvage (c) Alain DemaretDe temps à autre, si l’on est attentif, on croise les empreintes d’un sanglier ou les traces d’une biche ou d’une chèvre. Partout, on est entouré par le chant des oiseaux. Attention toutefois pour les personnes allergiques, à côté des épineux, il y a beaucoup de bouleaux. Le sentier porte bien son nom de “Trail Sauvage”. Seule l’arrivée à Einruhr est un peu décevante, car elle longe, sur un petit kilomètre, une route fréquentée par une circulation automobile dense qui n’est pas très compatible avec les aspirations du marcheur que je suis.

Le Wildnis Trail Pass

Badge du Wildnis TrailPetite obligation administrative oblige, avant de quitter Einruhr, j’ai dû passer par le point info pour réserver la navette qui me ramènera de Heimbach à Höffen. Sans réservation 24 h à l’avance, pas de navette. Le bureau n’ouvre qu’à 9 h. Un peu tard pour partir quand on sait que l’étape est difficile et qu’elle compte 31 kilomètres. En réalité, l’Association Touristique du Pays de Montjoie a découpé le Wildnis Trail en quatre étapes. En respectant ce timing, j’aurais pu profiter d’un package complet qui comprend le parking à Höfen (24 €), une carte topographique (10 €), 3 nuits en hébergement partenaire (35 à 60 € la nuit) et la navette de retour (13 €) pour 199 € (infos sur www.nationalpark-eifel.de). Comme je voulais n’en faire qu’à ma tête, j’ai découpé le parcours en trois jours avec deux nuits à passer sur place.

Einruhr — Wolfgarten

La rivière est présente (cà Alain DemaretBon, revenons-en parcours ! Le départ se prend au pied de l’église, à quelques mètres de l’hôtel et du point info. D’emblée on monte fort vers le point le plus haut la randonnée. On est à plus de 500 m d’altitude. Puis on s’enfonce dans une forêt dense. On suit à nouveau le cours de la rivière sur plusieurs kilomètres. La pluie est de la partie. Il manque (ou je rate) quelques points de repère “Wildnis Trail”. Mais je m’en tire grâce à la carte topographique.

Me voici sur le tracé de l’Eifel Steig avant de rejoindre le trajet original. J’ai froid, au loin, j’aperçois une petite ville et je me dis que je pourrais me réchauffer en y dégustant un café bien chaud. Mais la loi de la route me rattrape et me contrarie. Le sentier ne va pas jusque-là. Il ne traverse pas la rivière. Me voilà le dos tourné à cet hypothétique café tout en suivant toujours le cours d’eau. Au bout d’une nouvelle grimpette qui me réchauffe un peu, me voilà au-dessus du barrage de l’Urftstaumauer, le barrage sur l’Urft.

L'Urftstaumauer (c) Alain DemaretJe prends un peu de repos et j’en profite pour sortir mon réchaud et me préparer ce café tant attendu. Je trinque au retour des marquages à la tête de chat. Rien n’est perdu, je suis sur la bonne route. En repartant, il ne pleut plus, mais le ciel reste gris… Je dépasse un couple de marcheurs qui se promènent main dans la main. C’est vrai que le chemin possède ce petit je ne sais quoi de romantique. La première véritable descente s’effectue le long d’un magnifique petit sentier, étroit et sauvage (ici il faut être attentif, le sol est rendu glissant par les pluies du matin), avant de reprendre de la hauteur jusqu’au site de Wollseifen.

Solitude et étonnement

Volseifeffen (c) Alain DemaretC’est un ancien village très isolé où la solitude a laissé ses griffes. Le regard se porte sur l’ancienne école abandonnée et son exposition permanente qui racontent comment des hommes ont habité ici puis ont abandonné les lieux. Près de l’ancienne église, des bâtiments d’entraînement de l’armée, aux portes et fenêtres murées, laissent deviner le passé militaire de ce plateau retiré.

Ensuite, le tracé se fait plus technique. Une bonne condition physique et de bonnes chaussures sont indispensables. Mais là aussi, la difficulté est gérable, il suffit de faire attention. Soudain, au détour du sentier, on débouche sur le complexe de Vogelsand, un ancien centre d’entraînement de la Seconde Guerre mondiale. C’est très impressionnant. Je compte revenir visiter ce lieu. Il a été reconverti en centre de séminaire et une aile renferme le musée de la Croix-Rouge allemande.

Les jonquilles sauvage sont déjà en fleur (c) Alain DemaretD’ici, ce sera facile, il ne reste quasi que des descentes vers Gemünd, d’où j’aurai encore un peu de route, en montée, pour rejoindre Wolfgarten et le B & B où je passerai la nuit. Après un peu plus de 9 bonnes heures de marche, entrecoupées de quelques pauses (15 à 20 minutes) je suis arrivé à destination. L’étape fut sportive et fatigante. En respectant le découpage initial j’aurais dormi à Gemünd, ce qui est plus raisonnable si vous n’avez pas ou peu d’entraînement.

Wolfgarten — Zerkall

Je suis parti de bon matin. D’abord, j’ai rejoint Heimbach. Une bonne mise en jambe dès potron-minet, mais la route est magnifique. Une beauté qui se gagne au prix d’un peu d’effort.

Aujourd’hui, pas de place à l’improvisation. Le retour à la maison est déjà bien présent dans mon esprit. Il faut impérativement rejoindre Zerkall avant 15 h 45, car le dernier train qui peut me ramener à Heimbach, où la navette pour Höffen m’attendra, part à 15 h 51. Après tout, on est en Allemagne et la ponctualité est reine de la bienséance.

Sentier à peine tracé (c) ALain DemaretL’arrivée en descente à Heimbach est salvatrice. Un petit quart d’heure pour prendre un café dans un bar et me voilà reparti. Après un long passage en pente douce sur un chemin de bûcherons, la voiture d’un garde forestier me dépasse. Puis c’est la descente vers Schmidt.

La panneau de Zerkall (c) ALain DemaretCe tronçon est monotone au possible. Il est près de 14 h et je ne sais pas exactement combien de kilomètres il me reste à parcourir. Pressé par le temps pour attraper mon train, j’ai l’impression que cette fin de parcours n’en finit pas de se terminer. Enfin, une première borne m’annonce qu’il reste deux kilomètres pour arriver à Zerkall, je me sens plus à l’aise. Deux cents mètres plus loin, un panneau affiche trois kilomètres, c’est à la fois déstabilisant et frustrant. Je longe les fils barbelés qui délimitent une prairie où paissent des moutons, je dépasse un petit chemin qui mène à la voie de chemin de fer et me voilà devant le totem à la tête de chat qui marque la fin définitive du Wildnis Trail. Encore deux cents mètres et j’arrive à la gare dans les temps.

Retour à Höfen après trois jours dans l’Eiffel

Il était 14 h 45. J’ai pu prendre l’avant-dernier train pour Heimbach qui est arrivé dans les cinq minutes. Le retour à la civilisation s’est opéré au milieu d’écoliers et d’employés qui rentraient chez eux. En attendant la navette, j’ai même eu le temps de prendre un nouveau café et une part de gâteau dans le bar du matin.

Le trajet de 45 minutes en minibus est trop rapide pour ramener le marcheur à la réalité. Il me fait à nouveau détester la voiture. Ce furent les minutes les plus longues de mes trois jours dans l’Eifel. 

J’ai passé trois jours sur les sentiers de l’Eiffel et je suis content de retrouver ma voiture en un seul morceau, et je me prépare à rentrer à Liège. J’avoue que je me suis quand même avancé vers les premières marques, celles que j’avais manqué trois jours plus tôt. Un petit pincement au cœur. Bientôt me voilà au volant, déjà sur l’autoroute du retour. Ce n’est qu’un au-revoir à l’Eifel allemand.

Wildnis TrailMon avis : Le périple est technique à certains endroits. Sans être insurmontables, les difficultés apparaissent là où on ne les attend pas. En avril, j’ai croisé peu de monde, mais dès le mois de mai, on m’a assuré que les choses changeaient et que l’on pouvait rencontrer de nombreux marcheurs, tant sur le Wildnis Trail que sur les autres chemins balisés. Sur le parcours, on rencontre de nombreux bouleaux, c’est une essence problématique pour les personnes qui souffrent d’allergies. À chaque étape, le point info du Parc National de l’Eiffel peut apposer un cachet sur le carnet de route afin de valider chaque tronçon du Wildnis Trail. Au terme du périple, un certificat peut être délivré sur demande en présentant le document dûment tamponné. Sans être le témoin d’une aventure un peu sauvage, ce certificat reste un joli souvenir.

Alain
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